7 mai 2024

Une nuit d’enfer

Chaque jour qui passe sur The Transat CIC réserve aux marins son lot de surprises… Des bonnes souvent avec des bateaux lancés à des allures impressionnantes au portant comme on l’a vu fin de semaine dernière, et des mauvaises parfois avec des Class40 qui n’arrivent pas à avancer vers le but. La nuit d’hier était de celles-là et c’est probablement le jour le plus long que Fabien Delahaye ait connu depuis son départ de Lorient !

Une grande langue sans vent et emplie de fort courant lié aux effets du Gulf Stream (courant qui prend naissance au niveau de la Floride et du golfe du Mexique et longe ensuite les côtes américaines en direction du nord, avant de traverser l’Atlantique, ndlr) a littéralement barré la route des trois leaders : Ambrogio Beccaria (Alla Grande Pirelli), Ian Lipinski (Crédit Mutuel) et Fabien Delahaye sur le Class40 LEGALLAIS. C’est hier en fin de journée (heure française) que les effets ont été terribles d’abord pour le leader, Beccaria. À moins de 700 milles de New York, dans le sud d’une zone virtuelle interdite à la navigation pour protéger les cétacés, il a buté dans le fort courant atteignant par endroit plus de trois nœuds. Gérant en même temps un flux très faible, il s’est retrouvé impuissant face aux éléments et n’a rien pu faire pour empêcher son bateau de reculer par moment ! Un scénario invraisemblable au milieu de l’Atlantique Nord.

Ses poursuivants, Ian Lipinski et Fabien Delahaye, en ont profité pour fondre sur lui. Son matelas d’avance a disparu comme neige au soleil. Un épisode catastrophe durant lequel l’Italien a probablement dû perdre son sang-froid. Décalé d’une trentaine de milles dans son nord, Ian Lipinski a réussi à glisser très lentement. Moins ralenti qui ses deux adversaires, il a réalisé un joli coup et s’est emparé de la tête de la flotte vers 1h du matin. Ambrogio Beccaria n’a pourtant pas dit son dernier mot. À 11h ce matin, il est de nouveau à la première place du classement. Jusqu’à la fin, la bagarre en mer devrait être belle.

Fabien Delahaye a, quant à lui, lutté face à ce courant et cette panne totale de vent. « Je suis preneur de tout cierge déposé ou de m’envoyer un peu de vent par le moyen que vous souhaitez, j’accepte tout » plaisantait Fabien hier soir avec son équipe à terre. À bord, la réalité était tout autre… et l’ambiance était plutôt désespérée avec un vent encore plus faible que sur les prévisions et un courant contre et plus fort. La nuit s’est donc déroulée sans sommeil et sans manger pour traquer le moindre souffle afin de s’extirper de cette zone. Ce n’est que vers 1 heure du matin que le vent est rentré de nouveau et que les trois Class40 ont pu réaccélérer enfin dans la bonne direction.

Au final, Fabien a réussi à protéger sa troisième place. C’est donc un énorme soulagement même si l’écart s’est un peu creusé (une cinquantaine de milles) avec Lipinski et Beccaria à la lutte pour la première place. Nicolas d’Estais (Café Joyeux), premier poursuivant de LEGALLAIS, est à plus de 30 milles de son tableau arrière et la suite de la course ne devrait pas laisser place à de grands coups stratégiques.